Les mille visages de notre histoire

Libby a été l'ado le plus grosse des Etats-Unis, avant de perdre plus de 100 kilos et de pouvoir retourner au lycée, où on la juge toujours à travers son obésité. Jack est populaire mais cache un secret: il est atteint de prosopagnosie, il ne reconnaît pas les visages. Entre eux, tout a mal commencé. Mais ils vont apprendre à se connaître et peut-être même à s'aimer. La sensibilité de Jennifer Niven fait des merveilles et on ne lâche pas ce beau roman d'amour.

Jennifer Niven est un auteur qui ne triche pas. On le ressent immédiatement dès les premières pages de ce très beau roman. Son inspiration, elle la puise dans les existences cabossées de son entourage, qui, comme elle, ont souffert. Son ton est sensible sans jamais tomber dans la mièvrerie, ses personnages sont attachants, pudiques, singuliers, j'ai aimé le caractère bien trempé de Libby et ses réparties cinglantes qui fusent à tout bout de champ. Ces deux voix qui rythment son histoire, celles de Libby, de Jack, la rendent infiniment vivante, et lui donnent une vraie authenticité. Elles apportent au lecteur l'intimité, l'empathie, propices à repenser souvent à eux, une fois le livre refermé. Et enfin, pourquoi pas, le courage d'être ce qu'ils sont, l'assurance d'avoir le droit d'exister, de trouver sa place dans un monde de faux semblants, intolérant, impitoyable. Et rien que pour cela, ce livre mérite d'être lu.

Une fois le livre ouvert, je n’ai pas réussi à le reposer avant le milieu de la nuit. J'ai des cernes mais c'était merveilleux. De ces romans qui remettent en question notre vie, nos privilèges, nos repères, qui nous change, un peu? Soyons honnêtes, j'ai pleuré comme une madeleine pendant quelques chapitres, mais c'est une lecture dont on ressort fondamentalement heureux. Si vous avez aimé "Nos étoiles contraires" ou "A comme Aujourd'hui", avancez les yeux fermés. Ne pas se laisser effrayer par le pavé, on est accro tout de suite.